Révolution low‑code et IA : comment les CIO et CTO réinventent les équipes de développement

Pierre-Alexandre MAS
09/23/2025

Révolution low‑code et IA : comment les CIO et CTO réinventent les équipes de développement

Un environnement en pleine mutation

Nous vivons une accélération technologique sans précédent. La crise sanitaire a fait exploser la demande en services numériques, les cycles de vie des produits se sont raccourcis, et la concurrence se joue désormais sur la rapidité d’innovation. Dans ce contexte, les équipes de développement se retrouvent au cœur de la création de valeur. Elles doivent livrer plus vite, avec moins de ressources, et répondre à des attentes nouvelles des métiers et des clients. La pénurie de compétences accentue encore la pression : trouver un développeur expérimenté relève parfois du parcours du combattant.

 

En parallèle, les directions générales attendent davantage de souplesse et de réactivité de leur IT. Elles veulent tester des idées, mesurer rapidement leur potentiel et ne pas être freinées par des cycles de développement longs et coûteux. Les CIO et CTO sont donc appelés à jouer un rôle clé pour réinventer l’organisation des équipes de développement et rendre possible cette agilité.

 

L’essor du low code : démocratiser la création d’applications

Parmi les leviers de transformation, le low code (et son cousin le no code) occupe une place centrale. Ces plateformes permettent de concevoir des applications par assemblage de composants visuels, sans avoir à maîtriser la totalité des langages de programmation. Longtemps relégué au rang de gadget, le low code a désormais atteint une maturité telle que les analystes prévoient qu’une majorité des nouvelles applications en entreprise seront construites ainsi d’ici quelques années.

 

Ce succès s’explique par des gains immédiats. Les métiers peuvent créer eux‑mêmes des applications simples pour automatiser des tâches répétitives, rassembler des données éparpillées ou tester un nouveau service. Le temps et le coût de développement sont divisés par dix ou quinze par rapport à des approches traditionnelles. Pour un fournisseur de solutions marketing, par exemple, la possibilité de bâtir rapidement différents scénarios de tarification a ouvert la voie à une expérimentation à grande échelle qu’il aurait été impossible de financer avec un développement classique. Dans le secteur bancaire, certaines équipes utilisent des plateformes low code pour concevoir des interfaces client personnalisées, connectées via des API aux systèmes cœur de métier. Et des entreprises industrielles forment leurs employés sans diplôme informatique à construire en quelques semaines des applications de communication internes, diffusées à des milliers de collaborateurs.

 

Cet engouement doit toutefois s’accompagner de prudence. Le low code est parfait pour des prototypes, des applications simples ou des expérimentations rapides, mais il montre ses limites quand il s’agit de bâtir des solutions stratégiques devant supporter des millions d’utilisateurs ou intégrer des règles métiers complexes. Sans encadrement, les initiatives peuvent se transformer en chaos : multiplication d’outils disparates, difficultés de maintenance, failles de sécurité. Le travail du CIO et du CTO consiste alors à définir des standards, choisir les plateformes adaptées, mettre en place des mécanismes de gouvernance et accompagner la montée en compétences des “citizen developers”.

 

L’intelligence artificielle et les agents : de nouveaux horizons

Au-delà du low code, l’intelligence artificielle, et en particulier l’IA générative, ouvre des possibilités inédites. Les modèles de génération de code assistent déjà les développeurs pour accélérer l’écriture et la correction de fonctions. Les “agents” dopés à l’IA peuvent désormais automatiser des flux de travail entiers : répondre à des emails, planifier des réunions, déclencher des processus métiers ou produire des rapports. Mais l’adoption de ces outils se heurte à des réalités très humaines : manque de formation, peur de l’erreur, questionnements sur la confidentialité et la conformité.

 

Les organisations qui réussissent leur virage combinent deux ingrédients. Le premier est la formation. Les salariés qui reçoivent une initiation solide aux usages de l’IA générative affirment en général gagner du temps, et ils partagent leurs bonnes pratiques avec leurs collègues. Dans certaines entreprises pionnières, des “champions” ont été identifiés dans chaque département. Ces ambassadeurs participent à des sessions de formation ciblées, expérimentent les nouvelles fonctionnalités et diffusent ensuite leurs découvertes.

 

Le second ingrédient est la culture du partage. Lorsqu’un cas d’usage fonctionne, il est transformé en “objet social” : il est documenté, présenté, célébré. Cette viralité ascendante, où les utilisateurs s’approprient les outils et se les transmettent, rappelle exactement ce qui a permis au low code de décoller : des solutions simples à des problèmes concrets, portées par ceux qui en ont le plus besoin. Les CIO et CTO peuvent s’inspirer de ces principes pour promouvoir l’IA générative : fournir des environnements protégés d’expérimentation, récompenser les retours d’expérience, et intégrer l’IA dans les processus existants plutôt que d’imposer un nouvel outil de plus.

 

Du mode projet au mode produit : des équipes transverses et autonomes

La réinvention des équipes de développement ne se limite pas à l’adoption de nouveaux outils. Elle implique aussi une refonte organisationnelle. Beaucoup d’entreprises, notamment dans l’industrie ou les services, basculent du mode “projet” au mode “produit”. Dans le modèle traditionnel, on travaille sur des projets de quelques mois ou années, avec un début et une fin, puis les équipes se dispersent. Dans le mode produit, on crée des équipes transverses et pluridisciplinaires qui gèrent un service ou une application sur la durée. Ces équipes regroupent des développeurs, des spécialistes UX, des experts métier et des responsables qualité. Elles sont responsables de l’intégralité du cycle : conception, développement, déploiement, maintenance et amélioration continue. L’objectif est de se rapprocher des utilisateurs, de réagir rapidement à leurs retours et de mesurer la réussite avec des indicateurs de valeur (taux d’usage, satisfaction, revenus) plutôt qu’avec des jalons administratifs.

 

Des organisations pionnières ont déjà franchi le pas. Certaines ont même créé des départements dédiés aux relations avec les métiers, chargés de traduire la stratégie de chaque unité en solutions technologiques. D’autres ont mis en place des “digital factories” : des structures autonomes où sont rassemblés des experts du digital et des représentants des métiers pour co‑construire des produits innovants en toute agilité. Ces ateliers ont leur propre gouvernance, leurs ressources et leurs indicateurs. Ils accélèrent la mise en production de nouvelles idées et contribuent à diffuser la culture produit dans l’ensemble de l’entreprise.

 

Le rôle pivot du CIO et du CTO

Dans ce mouvement de réinvention, le CIO et le CTO jouent un rôle de chefs d’orchestre. Ils ne se contentent plus de gérer un parc informatique ; ils deviennent des stratèges, connectant les possibilités technologiques aux objectifs de l’entreprise. Ils doivent comprendre les besoins des métiers, identifier les opportunités et les risques, choisir les bons leviers (low code, IA, cloud, API), et expliquer clairement en quoi ces choix contribuent à la performance.

Pour remplir ce rôle, plusieurs défis doivent être relevés :

  • Porter une vision : définir une trajectoire claire pour les équipes de développement, alignée sur la stratégie de l’entreprise, et la partager avec l’ensemble des parties prenantes.

  • Mettre en place une gouvernance : établir des règles pour l’utilisation des plateformes low code et des outils d’IA, fixer des politiques d’accès aux données, garantir la sécurité et la conformité.

  • Structurer la formation et l’acculturation : proposer des parcours de montée en compétences pour les développeurs comme pour les métiers, organiser des ateliers de sensibilisation, créer des communautés de pratique.

  • Encadrer la citizen development : accompagner les collaborateurs non techniques qui souhaitent développer leurs propres outils, éviter l’éparpillement et assurer l’intégration au système d’information.

  • Mesurer et piloter la valeur : définir des indicateurs adaptés (temps de mise sur le marché, adoption, taux de réutilisation, gain financier), suivre les coûts liés à l’utilisation d’outils d’IA et ajuster les investissements.

  • Veiller à la qualité et à la sécurité : ne pas sacrifier l’excellence technique à la rapidité, prévoir des refontes lorsque les applications grandissent, et maintenir les normes de sécurité au plus haut niveau.

Cette gouvernance s’appuie souvent sur des structures nouvelles, comme les digital boards ou comités de transformation, où l’IT et les métiers se rencontrent régulièrement pour arbitrer les priorités et suivre les progrès.

 

Les bonnes pratiques pour réinventer les équipes de développement

Réinventer une organisation technique demande méthode et pragmatisme. Voici quelques principes qui ressortent des retours d’expérience :

  • Commencer par diagnostiquer : analyser les flux de travail, identifier les points de friction, comprendre les attentes des métiers et la maturité des équipes.

  • Expérimenter et apprendre : lancer des projets pilotes avec des outils low code ou des fonctionnalités d’IA sur des cas d’usage simples pour en tester les bénéfices et les limites.

  • Encourager la collaboration : organiser des ateliers réunissant développeurs et utilisateurs, favoriser le partage d’expériences et la co‑innovation.

  • Sécuriser et cadrer : définir des politiques d’utilisation, des conventions de développement, des règles d’architecture et de sécurité. Les “garde‑fous” ne doivent pas brider l’innovation, mais prévenir les dérives.

  • Accompagner le changement culturel : former, coacher, valoriser les réussites, instaurer une culture de feedback continu et de droit à l’erreur.

  • Planifier l’évolutivité : dès qu’une application ou un processus montre son potentiel, envisager la réécriture en technologies plus robustes pour supporter la croissance et s’intégrer durablement.

  • Mesurer et ajuster : suivre des indicateurs pertinents et ajuster la stratégie au fil de l’eau. Le retour sur investissement doit être évalué régulièrement pour justifier les efforts et ajuster les priorités.

Écueils à éviter

Certaines erreurs reviennent souvent chez les organisations qui se lancent dans la réinvention de leurs équipes de développement. La plus fréquente consiste à penser que les outils suffisent. Or, sans formation ni soutien, les plateformes low code ou les assistants IA deviennent inefficaces. Autre piège : lancer des projets stratégiques uniquement en no code sans avoir anticipé la montée en charge. À l’inverse, freiner toutes les initiatives par crainte des risques conduit à l’immobilisme. Il faut trouver un équilibre entre expérimentation et contrôle. Enfin, négliger la sécurité peut coûter cher : les applications créées en dehors du contrôle de la DSI peuvent devenir des portes d’entrée pour des attaques ou violer la réglementation sur les données. La présence du CIO et du CTO dans la définition de chaque initiative est donc indispensable.

 

L’apport de TransiCIO

TransiCIO accompagne les organisations qui souhaitent réinventer leurs équipes de développement. Notre approche combine diagnostic, conseil et mise en œuvre. Nous aidons à identifier les processus à transformer, à sélectionner les outils pertinents et à structurer les programmes de formation. Nous concevons des cadres de gouvernance pour que la citizen development et l’IA génèrent de la valeur sans compromettre la sécurité. Nous accompagnons la bascule vers le mode produit, en mettant en place des équipes transverses, des digital factories ou des plateformes de développement partagé. Enfin, nous pilotons la transformation pour qu’elle tienne compte de la culture et des contraintes propres à chaque organisation, avec des indicateurs qui parlent autant aux équipes IT qu’aux dirigeants.

 

Conclusion

La réinvention des équipes de développement est une aventure passionnante et exigeante. Les plateformes low code et l’intelligence artificielle offrent des leviers puissants pour accélérer et démocratiser la création de solutions. Le passage au mode produit et la mise en place de digital factories rapprochent l’IT et les métiers et ancrent l’innovation dans le quotidien. Mais ces outils et ces modèles ne suffisent pas. C’est l’alliance d’un leadership éclairé, d’une culture ouverte et d’une gouvernance solide qui fait la différence. Les CIO et CTO sont au cœur de cette transformation ; ils ont la responsabilité d’orchestrer les talents, les technologies et les processus pour que l’entreprise gagne en agilité et en performance.

 

Chez TransiCIO, nous sommes convaincus que cette réinvention est à la portée de toutes les organisations, pourvu qu’elles soient accompagnées et qu’elles osent remettre en cause leurs habitudes. Si vous souhaitez en discuter ou découvrir comment nous pouvons vous aider, n’hésitez pas à nous contacter via notre page LinkedIn ou en utilisant le formulaire de contact sur notre site.

Partagez cet article

Abonnez-vous à notre

newsletter

Besoin d’inspiration, de retours d’expérience concrets et de bonnes pratiques pour piloter vos transformations IT ?
Abonnez-vous à la newsletter de TransiCIO et recevez directement dans votre boîte mail nos publications les plus utiles, sélectionnées pour les dirigeants, décideurs IT et managers de transition. Pas de blabla. Que du solide.